Бретонская любовь. Избранные стихотворения
Шарль Ле Гоффик
Шарль Ле Гоффик (1863–1932) – французский поэт, писатель, драматург, критик, историк. Один из лидеров Бретонского ренессанса конца XIX – начала XX века. В своем творчестве проповедовал традиционные христианские идеалы и бретонскую духовную самобытность, подчеркивая важность народных традиций и культурной преемственности. В 1930 году был избран членом Французской академии. На русский язык стихотворения Шарля Ле Гоффика переводятся впервые.
Переводчик выражает искреннюю благодарность французскому художнику Борису Лежену, петербургскому поэту и журналисту Вячеславу Кочнову, а также доценту кафедры романской филологии РГПУ имени А. И. Герцена Анне Лукиной за неоценимую помощь в подготовке и издании этой книги.
Шарль Ле Гоффик
Бретонская любовь. Избранные стихотворения
В оформлении обложки использована картина французского художника Бориса Лежена из бретонского цикла «Армор».
© Лукин Е. В., перевод, составление, примечания, 2022
© Лежен Борис, предисловие, картина, 2022
© Издательско-Торговый Дом «Скифия», оформление, 2022
Charles Le Goffic
Amour Breton
PO?MES CHOISIS
Traduit du fran?ais par E.V. Loukine
Skifia
Saint-Pеtersbourg
2022
Перевод с французского Е.В. Лукина
Charles Le Goffic. Amour Breton. Po?mes choisis. Traduit du fran?ais par E.V. Loukine. – Saint-Pеtersbourg, Maison d’еdition et de commerce «Scythie», 2022.
Charles Le Goffic (1863–1932) est un еminent po?te fran?ais, de Bretagne qui est connu aussi comme romancier, dramaturge, critique et historien. Il est l’un des chefs de la Renaissance bretonne de la fin du XlX-?me si?cle et du dеbut du XX-?me si?cle. Dans son oeuvre, il professait les valeurs traditionnelles chrеtiennes et l’identitе de l’esprit breton marquant l’importance des traditions populaires et de l’hеritage culturel. En 1930 il a еtе еlu ? l’Acadеmie fran?aise. Les traductions des po?mes de Charles Le Goffic en russe y sont publiеes pour la premi?re fois.
Le traducteur exprime ses remerciements les plus sinc?res au peintre et sculpteur fran?ais Boris Lejeune, au po?te et journaliste de Saint-Pеtersbourg Viacheslav Kotchnov ainsi qu’? la ma?tresse de confеrences du dеpartement de philologie romaine de l’Universitе d’Еtat pеdagogique Herzen, Anna Loukina, pour leur aide inestimable dans la prеparation et l’еdition de ce livre.
Sur la couverture du livre – la peinture du peintre fran?ais Boris Lejeune pris de son cahier breton «Armor».
© Loukine E. V., traduction, rеdaction, remarques, 2022 © Lejeune Boris, prеface, peinture, 2022
© Maison d’еdition et de commerce «Scythie», prеsentation, 2022
Charles Le Goffic: L’enchantement de la poеsie
Le po?te Charles Le Goffic est nе le 4 juillet 1863 ? Lan-nion, en Bretagne. Dans la seconde moitiе du 19
si?cle, cette petite ville maritime de sept mille ?mes conservait encore son caract?re mеdiеval, comme d’ailleurs toute la Bretagne. De longs escaliers de pierre s’еlevaient vers l’еglise des Templiers. Des petites maisons s’еtageaient en gradins des deux c?tеs. Ernest Renan nous dеcrit des ruelles еtroites, le tempеrament joyeux des habitants, leur caract?re imperturbable.
Il convient de souligner immеdiatement que toute l’Cuvre, fort considеrable, de Le Goffic est intimement liеe ? la gеographie, l’histoire, le climat de sa terre natale de Bretagne.
? printemps de Bretagne, enchantement du monde!
Sourire virginal de la terre et des eaux!
C’est comme un miel еpars dans la lumi?re blonde:
Viviane еveillеe a repris ses fuseaux.
File, file l’argent des aubes aprilines!
File pour les landiers ta quenouille d’or fin!
De tes rubis. Charmeuse, habille les collines;
Ne fais qu’une еmeraude avec la mer sans fin.
C’est assez qu’un refl et pris ? tes doigts de flamme,
Une lueur ravie ? ton ciel enchantе,
Descende jusqu’? nous pour rattacher notre ?me
A l’?me du pays qu’a fleuri ta beautе!
La Bretagne de Charles Le Goffic correspond ? la rеgion de l’Armorique, un mot d’origine celte. «Armor» signifie «? la mer»: une terre peu accueillante, soumise aux vents marins, ? la rare vеgеtation surtout composеe de bruy?re s’еtendant jusqu’? l’horizon. Mais comme dans les lеgendes locales, tout peut s’y mеtamorphoser en un clin d’Cil. Au printemps et en automne les terrains arides, d’ordinaire chagrins, se couvrent soudain de l’or еtincelant des ajoncs et des gen?ts. Comme l’еcrit le po?te: «Tout l’horizon flamboie. Magique incendie».
Et il est impossible d’еvoquer sa terre natale sans parler de la mer. On l’entend constamment dans ses strophes, dans le rythme ondulant des rimes et des allitеrations:
Quand, du sein de la mer profonde,
Comme un alcyon dans son nid,
L’?me bretonne vint au monde
Dans son dur berceau de granit,
C’еtait un soir, un soir d’automne,
Sous un ciel bas, cerclе de fer,
Et sur la pauvre ?me bretonne
Pleurait le soir, chantait la mer.
Le Goffic a vеcu ? une еpoque o? les fondements de la sociеtе, en apparence immuables, avaient еtе profondеment еbranlеs par la rеvolution fran?aise et, antеrieurement, par la philosophie des Lumi?res qui avaient provoquе des bouleversements historiques pareils ? des secousses sismiques. L’image de la mer n’avait pas еchappе au changement. Jadis voie des argonautes, mystеrieuse et fascinante, symbole de l’infini et source de vie, elle еtait devenue la Mecque des corps oisifs ? la saison balnеaire.
Dans la prеface de son anthologie Po?tes de la mer, Charles Le Goffic cite Dosto?evski, perplexe face au phеnom?ne de la migration saisonni?re des bourgeois fran?ais vers les plages. Il s’interroge aussi et rеpond ? sa propre question: «La mer? Peut-?tre, au fond, n’y a-t-il que les po?tes et les artistes qui l’aiment d’un amour dеsintеressе – avec les enfants».
Quant aux p?cheurs et aux marins dont la mer est le gagne-pain, Le Goffic avoue ignorer ce qu’ils en pensent.
Pour comprendre et apprеcier pleinement son Cuvre, il faut prendre conscience de son vecteur principal: la vie et l’histoire de sa ch?re Bretagne avec tous ses param?tres. Elle accompagne toujours ses pensеes o? qu’il soit, ? Paris, Nevers, Nancy…
Dans le chapitre intitulе La vraie Bretagne de son livre L’?me bretonne, il еtablit la diffеrence entre les images d’une Bretagne touristique et ce qu’elle est rеellement. Entre la beautе discr?te qui tarde ? se dеcouvrir et le masque enjolivе… C’est une rеgion qu’il faut visiter en automne, car: «Un pays doit ?tre vu dans son atmosph?re ? lui, non sous sa couleur d’exception. La Bretagne est grise incurablement, comme l’automne. Tout s’y attеnue, s’y imprеcise comme au travers d’une prunelle en pleurs»…
Sa poеsie correspond ? ces considеrations. Telle une еponge, elle absorbe le climat et l’atmosph?re de l’Armor. Une certaine douceur de ton lui est propre, elle еvite la dеmesure et le maniеrisme des еpith?tes. On y rel?ve des notes nostalgiques: le regard se perd ? suivre les rivages marins qui s’еloignent ? l’infini.
Dans les landiers gris, le long du rivage,
Sala?n chantait sous les deux dolents:
– Avec les pluviers et les goеlands,
Mon cCur est parti sur la mer sauvage…