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Plus fort que Sherlock Holmès

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2017
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– Voici: J'ai donc écrit au Directeur Général du Département des Cuirs et chaussures une lettre des plus courtoises, en lui expliquant…

– Le connaissez-vous personnellement ?

– Non.

– Voilà déjà un point bien clair. Vous avez débuté par une maladresse. Continuez…

– Dans ma lettre, j'insistais sur l'avenir assuré que promettait l'invention, vu le bon marché de ces chaussures, et j'offrais…

– D'aller le voir. Bien entendu, c'est ce que vous avez fait. Et de deux !

– Il ne m'a répondu que trois jours après.

– Naturellement! Continuez.

– Il m'a envoyé trois lignes tout juste polies, en me remerciant de la peine que j'avais prise, et en me proposant…

– Rien du tout.

– C'est cela même. Alors je lui écrivis plus de détails sur mon invention…

– Et de trois !

– Cette fois je… n'obtins même pas de réponse. A la fin de la semaine, je revins à la charge et demandai une réponse avec une légère pointe d'aigreur.

– Et de quatre! et puis après ?

– Je reçus une réponse me disant que ma lettre n'était pas arrivée; on m'en demandait un double. Je recherchai la voie qu'avait suivie ma lettre et j'acquis la certitude qu'elle était bien arrivée; j'en envoyai quand même une copie sans rien dire. Quinze jours se passèrent sans qu'on accordât la moindre attention à ma demande; pendant ce temps, ma patience avait singulièrement diminué et j'écrivis une lettre très raide. Je proposais un rendez-vous pour le lendemain et j'ajoutai que si je n'avais pas de réponse, je considérerais ce silence du Directeur comme un acquiescement à ma demande.

– Et de cinq !

– J'arrivai à midi sonnant; on m'indiqua une chaise dans l'antichambre en me priant d'attendre. J'attendis jusqu'à une heure et demie, puis je partis, humilié et furieux. Je laissai passer une semaine pour me calmer. J'écrivis ensuite et donnai un nouveau rendez-vous pour l'après-midi du lendemain.

– Et de six !

– Le Directeur m'écrivit qu'il acceptait. J'arrivai ponctuellement et restai assis sur ma chaise jusqu'à deux heures et demie. Écœuré et furieux, je sortis de cette antichambre maudite, jurant qu'on ne m'y reverrait jamais plus. Quant à l'incurie, l'incapacité et l'indifférence pour les intérêts de l'armée que venait de témoigner le Directeur Général du Département des Cuirs et chaussures, elles étaient décidément au-dessus de tout.

– Permettez! Je suis un vieil homme de grande expérience et j'ai vu bien des gens passant pour intelligents qui n'avaient pas assez de bon sens pour mener à bonne fin une affaire aussi simple que celle dont vous m'entretenez. Vous n'êtes pas pour moi le premier échantillon de ce type, car j'en ai connu personnellement des millions et des milliards qui vous ressemblaient. Vous avez perdu trois mois bien inutilement; l'inventeur les a perdus aussi, et les soldats n'en sont pas plus avancés; total: neuf mois. Eh bien, maintenant je vais vous lire une anecdote que j'ai écrite hier soir, et demain dans la journée vous irez enlever votre affaire chez le Directeur Général.

– Je veux bien, mais le connaissez-vous ?

– Du tout, écoutez seulement mon histoire.

II

COMMENT LE RAMONEUR GAGNA L'OREILLE DE L'EMPEREUR

I

L'été était venu; les plus robustes étaient harassés par la chaleur torride; les plus faibles, à bout de souffle, mouraient comme des mouches. Depuis des semaines, l'armée était décimée par la dysenterie, cette plaie du soldat; et personne n'y trouvait un remède. Les médecins ne savaient plus où donner de la tête; le succès de leur science et de leurs médicaments (d'une efficacité douteuse, entre nous), était dans le domaine du passé, et risquait fort d'y rester enfoui à tout jamais.

L'empereur appela en consultation les sommités médicales les plus en renom, car il était profondément affecté de cette situation. Il les traita fort sévèrement, et leur demanda compte de la mort de ses hommes; connaissaient-ils leur métier, oui ou non? étaient-ils des médecins ou simplement de vulgaires assassins? Le plus haut en grade de ces assassins, qui était en même temps le doyen des médecins du pays et le plus considéré aux environs, lui répondit ceci :

« Majesté, nous avons fait tout notre possible, et nos efforts sont restés infructueux. Ni un médicament, ni un médecin ne peut guérir cette maladie; la nature et une forte constitution seules peuvent triompher de ce mal maudit. Je suis vieux, j'ai de l'expérience. Ni médecine, ni médicaments ne peuvent en venir à bout, je le dis et je le répète. Quelquefois ils semblent aider la nature, mais en général ils ne font qu'aggraver la maladie. »

L'empereur, qui était un homme incrédule, emporté, invectiva les docteurs des épithètes les plus malsonnantes et les renvoya brutalement. Vingt-quatre heures après, il était pris, lui aussi, de ce mal cruel. La nouvelle vola de bouche en bouche, et remplit le pays de consternation. On ne parlait plus que de cette catastrophe et le découragement était général; on commençait à perdre tout espoir. L'empereur lui-même était très abattu et soupirait en disant :

« Que la volonté de Dieu soit faite. Qu'on aille me chercher ces assassins, et que nous en finissions au plus vite. »

Ils accoururent, lui tâtèrent le pouls, examinèrent sa langue, et lui firent avaler un jeu complet de drogues, puis ils s'assirent patiemment à son chevet, et attendirent.

(Ils étaient payés à l'année et non à la tâche, ne l'oublions pas !)

II

Tommy avait seize ans; c'était un garçon d'esprit, mais il manquait de relations; sa position était trop humble pour cela et son emploi trop modeste. De fait, son métier ne pouvait pas le mettre en évidence; car il travaillait sous les ordres de son père et vidait les puisards avec lui; la nuit, il l'aidait à conduire sa voiture. L'ami intime de Tommy était Jimmy, le ramoneur; un garçon de quatorze ans, d'apparence grêle; honnête et travailleur, il avait un cœur d'or et faisait vivre sa mère infirme, de son travail dangereux et pénible.

L'empereur était malade depuis déjà un mois, lorsque ces deux jeunes gens se rencontrèrent un soir vers neuf heures. Tommy était en route pour sa besogne nocturne; il n'avait naturellement pas endossé ses habits des jours de fête, et ses sordides vêtements de travail étaient loin de sentir bon! Jimmy rentrait d'une journée ardue; il était d'une noirceur inimaginable; il portait ses balais sur son épaule, son sac à suie à la ceinture; pas un trait de sa figure n'était d'ailleurs reconnaissable; on n'apercevait au milieu de cette noirceur que ses yeux éveillés et brillants.

Ils s'assirent sur la margelle pour causer; bien entendu ils abordèrent l'unique sujet de conversation: le malheur de la nation, la maladie de l'empereur. Jimmy avait conçu un projet et il brûlait du désir de l'exposer.

Il confia donc son secret à son ami :

– Tommy, dit-il, je puis guérir Sa Majesté; je connais le moyen.

Tommy demanda stupéfait :

– Comment, toi ?

– Oui, moi.

– Mais, petit serin, les meilleurs médecins n'y arrivent pas.

– Cela m'est égal, moi j'y arriverai. Je puis le guérir en un quart d'heure.

– Allons, tais-toi. Tu dis des bêtises.

– La vérité. Rien que la vérité !

Jimmy avait un air si convaincu que Tommy se ravisa et lui demanda :

– Tu m'as pourtant l'air sûr de ton affaire, Jimmy. L'es-tu vraiment ?

– Parole d'honneur.

– Indique-moi ton procédé. Comment prétends-tu guérir l'empereur ?

– En lui faisant manger une tranche de melon d'eau.
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