(MARDI MIDI.) – La cour de la maison mortuaire.
ERNEST ROYER à une fenêtre, son chapeau sur la tête.
ERNEST.
Eh! dis-donc, Charles? bonjour!
CHARLES, paraissant à une fenêtre en face.
Tiens! t'es donc pas à ta pension?
ERNEST.
Non.
CHARLES.
Pourquoi donc?
ERNEST.
Je vais à l'enterrement de maman. Il s'ra j'ment beau, va; y aura trois voitures noires; je serai dans une.
CHARLES.
Oh! je voudrais-t'y y aller avec toi.
ERNEST.
Tu ne peux pas, tu n'es pas invité; si tu savais tout c'monde qu'il y a dans le salon!
CHARLES.
Mais, dis-donc, tu ne pleures pas?
ERNEST.
J'peux pas; j'ai pas envie.
CHARLES.
Moi j'ai j'ment pleuré quand ma grand'maman est morte.
ERNEST.
Elle t'grondait toujours.
CHARLES.
Je sais bien; mais papa et maman pleuraient, moi je pleurais aussi.
ERNEST.
Oh bien oui! mais papa ne pleure pas.
CHARLES.
Dis-donc: en revenant, tu viendras jouer?
ERNEST.
Si ma bonne veut.
CHARLES.
Nous jouerons à la garde nationale.
ERNEST.
Oui; mais alors je veux être Lafayette.
CHARLES.
Tu le seras: moi je serai artilleur.
ERNEST.
Nous ferons l'émeute.
CHARLES.
Ça y est.
ERNEST.
Otons-nous de la fenêtre, voilà un croque-mort qui se promène dans la cour; ma bonne m'a dit que ces hommes-là étaient très-méchans.
SCÈNE IV.
(MIDI ET DEMI.)
MARGUERITE, cuisinière de M. Royer, PICARD, dit Coeur-Volant, croque-mort.
PICARD, s'approchant de la porte de la cuisine.
Vous effondrez là, mademoiselle, une bien belle volaille; combien ça peut-il revenir une pièce comme ça?
MARGUERITE.