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Le Collier de la Reine, Tome I

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2017
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– Allons, décidément, dit Philippe, vous êtes tout à fait fou, monsieur; vous ne me tuerez pas, et vous aurez un rôle tout vulgaire; car vous serez blessé sans cause et sans profit, nul ne sachant pourquoi nous nous sommes battus.

Charny poussa un coup droit si rapide que cette fois ce fut à grand-peine que Philippe arriva à temps à la parade; mais, en arrivant à la parade, il lia l'épée, et d'un vigoureux coup de fouet la fit sauter à dix pas de son adversaire.

Aussitôt il s'élança sur l'épée qu'il brisa d'un coup de talon.

– Monsieur de Charny, dit-il, vous n'aviez pas à me prouver que vous êtes brave: vous me détestez donc bien que vous avez mis cet acharnement à vous battre contre moi?

Charny ne répondit pas; il pâlissait visiblement.

Philippe le regarda pendant quelques secondes pour provoquer de sa part un aveu ou une dénégation.

– Allons, monsieur le comte, dit-il, le sort en est jeté, nous sommes ennemis.

Charny chancela. Philippe s'élança pour le soutenir; mais le comte repoussa sa main.

– Merci, dit-il, j'espère aller jusqu'à ma voiture.

– Prenez au moins ce mouchoir pour étancher le sang.

– Volontiers.

Et il prit le mouchoir.

– Et mon bras, monsieur; au moindre obstacle que vous rencontrerez, chancelant comme vous êtes, vous tomberez et votre chute vous sera une douleur inutile.

– L'épée n'a traversé que les chairs, dit Charny. Je ne sens rien dans la poitrine.

– Tant mieux, monsieur.

– Et j'espère être bientôt guéri.

– Tant mieux encore, monsieur. Mais si vous hâtez de vos veux cette guérison pour recommencer ce combat, je vous préviens que vous retrouverez difficilement en moi un adversaire.

Charny essaya de répondre, mais les paroles moururent sur ses lèvres; il chancela, et Philippe n'eut que le temps de le retenir entre ses bras.

Alors il le souleva comme il eût fait d'un enfant, et le porta à moitié évanoui jusqu'à sa voiture.

Il est vrai que Dauphin, ayant à travers les arbres vu ce qui se passait, abrégea le chemin en venant au-devant de son maître.

On déposa Charny dans la voiture; il remercia Philippe d'un signe de tête.

– Allez au pas, cocher, dit Philippe.

– Mais vous, monsieur? murmura le blessé.

– Oh! ne vous inquiétez pas de moi.

Et saluant à son tour, il referma la portière.

Philippe regarda le carrosse s'éloigner lentement; puis le carrosse ayant disparu au détour d'une allée, il prit lui-même la route qui devait le ramener à Paris par le chemin le plus court.

Puis, se retournant une dernière fois, et apercevant le carrosse qui, au lieu de revenir comme lui vers Paris, tournait du côté de Versailles et se perdait dans les arbres, il prononça ces trois mots, mots profondément arrachés de son cœur après une profonde méditation:

– Elle le plaindra!

Chapitre XXXIII

La maison de la rue Neuve-Saint-Gilles

À la porte du garde, Philippe trouva un carrosse de louage et sauta dedans.

– Rue Neuve-Saint-Gilles, dit-il au cocher, et vivement.

Un homme qui vient de se battre et qui a conservé un air vainqueur, un homme vigoureux dont la taille annonce la noblesse, un homme vêtu en bourgeois et dont la tournure dénonce un militaire, c'était plus qu'il n'en fallait pour stimuler le brave homme, dont le fouet, s'il n'était pas comme le trident de Neptune le sceptre du monde, n'en était pas moins pour Philippe un sceptre très important.

L'automédon à vingt-quatre sous dévora donc l'espace et apporta Philippe tout frémissant rue Saint-Gilles, à l'hôtel du comte de Cagliostro.

L'hôtel était d'une grande simplicité extérieure, d'une grande majesté de lignes, comme la plupart des bâtiments élevés sous Louis XIV, après les concetti de marbre ou de brique entassés par le règne de Louis XIII sur la Renaissance.

Un vaste carrosse, attelé de deux bons chevaux, se balançait sur ses moelleux ressorts, dans une vaste cour d'honneur.

Le cocher, sur son siège, dormait dans sa vaste houppelande fourrée de renard; deux valets, dont l'un portait un couteau de chasse, arpentaient silencieusement le perron.

À part ces personnages agissants, nul symptôme d'existence n'apparaissait dans l'hôtel.

Le fiacre de Philippe ayant reçu l'ordre d'entrer, tout fiacre qu'il était, héla le suisse, qui fit aussitôt crier les gonds de la porte massive.

Philippe sauta à terre, s'élança vers le perron, et s'adressant aux deux valets à la fois:

– M. le comte de Cagliostro? dit-il.

– M. le comte va sortir, répondit un des valets.

– Alors, raison de plus pour que je me hâte, dit Philippe, car j'ai besoin de lui parler avant qu'il sorte. Annoncez le chevalier Philippe de Taverney.

Et il suivit le laquais d'un pas si pressé qu'il arriva en même temps que lui au salon.

– Le chevalier Philippe de Taverney! répéta après le valet une voix mâle et douce à la fois. Faites entrer.

Philippe entra sous l'influence d'une certaine émotion que cette voix si calme avait fait naître en lui.

– Excusez-moi, monsieur, dit le chevalier en saluant un homme de grande taille, d'une vigueur et d'une fraîcheur peu communes, et qui n'était autre que le personnage qui nous est déjà successivement apparu à la table du maréchal de Richelieu, au baquet de Mesmer, dans la chambre de Mlle Oliva et au bal de l'Opéra.

– Vous excuser, monsieur! Et de quoi? répondit-il.

– Mais de ce que je vais vous empêcher de sortir.

– Il eût fallu vous excuser si vous étiez venu plus tard, chevalier.

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