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Le Collier de la Reine, Tome I

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2017
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L'homme aux écus remercia, comme d'un compliment tout naturel, et se retira.

– Dites à M. le comte que je l'attends à son premier souhait, dit-il, et ajoutez qu'il soit tranquille; je sais garder un secret.

– C'est inutile, répliqua le payeur, M. le comte de Cagliostro est indépendant, il ne croit pas au magnétisme; il veut que l'on rie de M. Mesmer, et propage l'aventure du baquet pour ses menus plaisirs.

– Bien, murmura une voix sur le seuil de la porte, nous tâcherons que l'on rie aussi aux dépens de M. le comte de Cagliostro.

Et M. Réteau vit apparaître dans sa chambre un personnage qui lui parut bien autrement lugubre que le premier.

C'était, comme nous l'avons dit, un homme jeune et vigoureux; mais Réteau ne partagea point l'opinion que nous avons émise sur sa bonne mine.

Il lui trouva l'œil menaçant et la tournure menaçante.

En effet, il avait la main gauche sur le pommeau d'une épée, et la main droite sur la pomme d'une canne.

– Qu'y a-t-il pour votre service, monsieur? demanda Réteau avec une sorte de tremblement qui lui prenait à chaque occasion un peu difficile.

Il en résulte que, comme les occasions difficiles n'étaient pas rares, Réteau tremblait souvent.

– Monsieur Réteau? demanda l'inconnu.

– C'est moi.

– Qui se dit de Villette?

– C'est moi, monsieur.

– Gazetier?

– C'est bien moi toujours.

– Auteur de l'article que voici? dit froidement l'inconnu en tirant de sa poche un numéro frais encore de la gazette du jour.

– J'en suis effectivement, non pas l'auteur, dit Réteau, mais le publicateur.

– Très bien; cela revient exactement au même; car si vous n'avez pas eu le courage d'écrire l'article, vous avez eu la lâcheté de le laisser paraître. Je dis lâcheté, répéta l'inconnu froidement, parce qu'étant gentilhomme, je tiens à mesurer mes termes, même dans ce bouge. Mais il ne faut pas prendre ce que je dis à la lettre, car ce que je dis n'exprime pas ma pensée. Si j'exprimais ma pensée, je dirais: «Celui qui a écrit l'article est un infâme! Celui qui l'a publié est un misérable!»

– Monsieur! dit Réteau, devenant fort pâle.

– Ah! dame! voilà une mauvaise affaire, c'est vrai, continua le jeune homme, s'animant au fur et à mesure qu'il parlait. Mais écoutez donc, monsieur le folliculaire, chaque chose à son tour; tout à l'heure, vous avez reçu les écus, maintenant vous allez recevoir les coups de bâton.

– Oh! s'écria Réteau, nous allons voir.

– Et qu'allons-nous voir? fit d'un ton bref et tout militaire le jeune homme, qui, en prononçant ces mots, s'avança vers son adversaire.

Mais celui-ci n'en était pas à la première affaire de ce genre; il connaissait les détours de sa propre maison; il n'eut qu'à se retourner pour trouver une porte, la franchir, en repousser le battant, s'en servir comme d'un bouclier, et gagner de là une chambre adjacente qui aboutissait à la fameuse porte de dégagement donnant sur la rue des Vieux-Augustins.

Une fois là, il était en sûreté: il y trouvait une autre petite grille qu'en un tour de clef – et la clef était toujours prête – il ouvrait en se sauvant à toutes jambes.

Mais ce jour-là était un jour néfaste pour ce pauvre gazetier; car au moment où il mettait la main sur cette clef, il aperçut par la claire-voie un autre homme qui, grandi sans doute par l'agitation du sang, lui parut un Hercule, et qui, immobile, menaçant, semblait attendre comme jadis le dragon d'Hespérus attendait les mangeurs de pommes d'or.

Réteau eût bien voulu revenir sur ses pas, mais le jeune homme à la canne, celui qui le premier s'était présenté à ses yeux, avait enfoncé la porte d'un coup de pied, l'avait suivi, et maintenant qu'il était arrêté par la vue de cette autre sentinelle, armée aussi d'une épée et d'une canne, il n'avait qu'une main à étendre pour le saisir.

Réteau se trouvait pris entre deux feux, ou plutôt entre deux cannes, dans une espèce de petite cour obscure, perdue, sourde, située entre les dernières chambres de l'appartement et la bienheureuse grille qui donnait sur la rue des Vieux-Augustins, c'est-à-dire, si le passage eût été libre, sur le salut et la liberté.

– Monsieur, laissez-moi passer, je vous prie, dit Réteau au jeune homme qui gardait la grille.

– Monsieur, s'écria le jeune homme qui poursuivait Réteau, monsieur, arrêtez ce misérable.

– Soyez tranquille, monsieur de Charny, il ne passera pas, dit le jeune homme de la grille.

– Monsieur de Taverney, vous! s'écria Charny, car c'était lui en effet qui s'était présenté le premier chez Réteau à la suite du payeur, et par la rue Montorgueil.

Tous deux, en lisant la gazette, le matin, avaient eu la même idée, parce qu'ils avaient dans le cœur le même sentiment, et, sans se le communiquer le moins du monde l'un à l'autre, ils avaient mis cette idée à exécution.

C'était de se rendre chez le gazetier, de lui demander satisfaction, et de le bâtonner s'il ne la leur donnait pas.

Seulement chacun d'eux, en apercevant l'autre, éprouva un mouvement de mauvaise humeur; chacun devinait un rival dans l'homme qui avait éprouvé la même sensation que lui.

Aussi ce fut avec un accent assez maussade que M. de Charny prononça ces quatre mots:

– Monsieur de Taverney, vous!

– Moi-même, répondit Philippe avec le même accent dans la voix, en faisant de son côté un mouvement vers le gazetier suppliant, qui passait ses deux bras par la grille; moi-même; mais il paraît que je suis arrivé trop tard. Eh bien! je ne ferai qu'assister à la fête, à moins que vous n'ayez la bonté de m'ouvrir la porte.

– La fête, murmura le gazetier épouvanté, la fête, que dites-vous donc là? Allez-vous m'égorger, messieurs?

– Oh! dit Charny, le mot est fort. Non, monsieur, nous ne vous égorgerons pas, mais nous vous interrogerons d'abord, ensuite nous verrons. Vous permettez que j'en use à ma guise avec cet homme, n'est-ce pas, monsieur de Taverney?

– Assurément, monsieur, répondit Philippe, vous avez le pas, étant arrivé le premier.

– Çà, collez-vous au mur, et ne bougez, dit Charny, en remerciant du geste Taverney. Vous avouez donc, mon cher monsieur, avoir écrit et publié contre la reine le conte badin, vous l'appelez ainsi, qui a paru ce matin dans votre gazette?

– Monsieur, ce n'est pas contre la reine.

– Ah! bon, il ne manquait plus que cela.

– Ah! vous êtes bien patient, monsieur, dit Philippe rageant de l'autre côté de la grille.

– Soyez tranquille, répondit Charny; le drôle ne perdra pas pour attendre.

– Oui, murmura Philippe; mais c'est que, moi aussi, j'attends.

Charny ne répondit pas, à Taverney du moins.

Mais se retournant vers le malheureux Réteau:

– Etteniotna, c'est Antoinette retournée… Oh! ne mentez pas, monsieur… Ce serait si plat et si vil, qu'au lieu de vous battre ou de vous tuer proprement, je vous écorcherais tout vif. Répondez donc, et catégoriquement. Je vous demandais si vous étiez le seul auteur de ce pamphlet?

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